GESTION VIE EXTRA SPORTIVE ET ENTRAINEMENT par Amandine Le Cornec (première partie)

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Réflexion d’entraineur

L’amélioration de la performance nécessite de la part de l’entraîneur de prendre en compte les différents projets constitutifs du projet de vie du sportif. Qu’en pensez-vous ?
En athlétisme, la majorité des athlètes de haut niveau poursuit leurs études ou leur vie professionnelle en parallèle de leurs entraînements. Etant donné que ce n’est pas une discipline professionnelle comme le football qui peut rémunérer de façon excessive, les athlètes doivent avoir un autre projet que celui sportif.  Ça a été le cas de la détentrice du record de France de 800m féminin, Patricia DJATE (1’56’’53 en 1995). Afin d’optimiser sa planification, son entraîneur et la recordwoman devaient concilier l’entraînement avec son projet de vie scolaire de 1986 à 1995, puis avec sa professionnalisation (de 1995 à 2000). Malheureusement, ce phénomène s’entend au-delà du sport de haut niveau et atteint également les athlètes de tout niveau confondu.

Etant spécialiste de 800m, je prendrais comme exemple le 800m mais cette recommandation concerne toutes les disciplines. En athlétisme excepté les relais ce sont des courses individuelles, considérées comme un challenge mental et physique. Revenons à notre exemple : le 800m est un effort intense prolongé couru à 120-125% VMA, sollicitant la filière aérobie (40%), la filière anaérobie (60%), la technicité de la foulée pour l’économie de course et une forte force mentale (en particulier la confiance en soi, la motivation, et la gestion de stress). Etant donné l’investissement physique individuel que le 800m requiert, l’athlète doit toujours être en forme tant physiquement que mentalement et motivé à l’entraînement afin de concrétiser son travail en compétition. Par conséquent, il est préférable que l’entraîneur tienne compte des objectifs de la vie sportive et extra-sportive du sportif.

            Pour valider l’entraînement, l’athlète doit améliorer sa performance. Elle correspond à un perfectionnement personnel prenant en considération les dimensions mentales, physiques et technico-tactique.

Pour optimiser sa performance, l’athlète a besoin de son entraîneur (beaucoup d’athlètes s’entraînent seul mais il est préférable d’avoir un entraîneur pour l’objectivité, le sens d’analyse, le recul des entraînements etc). En effet, au sein du « système Entraînement, Entraîneur, Athlète », l’entraîneur est une personne exerçant un rôle multifactoriel afin de répondre à la complexité de l’entraînement. Dans ses rôles-clés, il programme, régule et évalue l’entraînement. Mais il joue également le rôle d’interface entre l’athlète, ses espoirs et la performance. Dans ce cas, il est communicateur, accompagnateur, coordinateur, créateur, guide spirituel et organisateur, d’où l’intérêt de prendre en compte la singularité du sportif avec ses projets de vie pour améliorer sa performance.

NB : Un projet est un ensemble articulé d’objectif et de moyen destinés à les réaliser (MALGLAIVE). Par conséquent, les différents projets constitutifs du projet de vie sont un ensemble de projets ayant pour but d’atteindre les objectifs de l’existence du quotidien de l’athlète dont son environnement. Ils peuvent correspondre aux études, à la vie sportive, et la famille tout en tenant compte de son rythme de vie.

Quels sont les intérêts de prendre en considération les projets constitutifs du projet de vie du sportif ? L’entraîneur doit-il tenir compte de la totalité de ces projets ? Ont-ils un impact sur l’entraînement ? Sont-ils tous primordiaux pour l’amélioration de la performance ? Quelles seraient les limites de les prendre tous en considération ? De quelles manières concilier ses projets avec l’entraînement ?

En effet, si l’entraîneur réduit l’amélioration de la performance à une approche analytique de l’entraînement sans prendre en compte les projets constitutifs du projet de vie, le sportif risquera alors de ne pas progresser de façon optimale. Il devra alors prendre en compte l’importance de concilier les projets de vie du sportif avec l’entraînement. Pour cela, il devra choisir la méthode la mieux approprier pour allier les deux et risque de rencontrer certaines limites à ce système.

  • L’importance de concilier les projets de vie de l’athlète avec l’entraînement :

            Plusieurs raisons existent pour expliquer pourquoi il est important pour l’amélioration de la performance que l’entraîneur tienne compte des différents projets constitutifs du projet de vie du sportif. Ici nous en retiendrons trois : (1) l’optimisation de la stratégie opératoire d’entraînement, (2) l’amélioration de l’aspect psychologique, et (3) la communication entre l’entraîneur et l’athlète.

1/ L’optimisation de la stratégie opératoire d’entraînement

Afin d’optimiser la stratégie opératoire de l’entraîneur relative aux projets de l’athlète, il devra planifier et programmer selon les principes organisationnels, de manière très précise et adaptée à l’athlète. Par conséquent, la programmation fera appel à un principe spécifique : la triple adaptation également appelée les 3A (adaptation à l’activité, à l’athlète et au temps disponible). Par exemple, l’entraîneur programme une séance de Puissance Anaérobie Lactique qui demande de longue récupération donc un grand créneau horaire pour la réaliser. L’athlète devra donc être disponible mais s’il n’a très peu de temps et qu’il bâcle son échauffement pour l’effectuer, il risquera la blessure, surtout dans ces séances où les muscles sont très sollicités.

L’entraîneur devra également suivre cette triple adaptation concernant les charges d’entraînement. L’optimisation d’un travail qualitatif de la charge est primordiale pour améliorer la performance. La charge est une mesure, un coût, une conséquence. La charge d’entraînement doit prendre en considération l’ensemble des perturbations provoquées chez le sportif pour être la plus précise possible. L’entraîneur doit réguler la charge externe correspondant à l’environnement de l’athlète. Il a une action directe sur celle-ci contrairement à la charge interne faisant référence aux ressources, au fonctionnement de l’organisme dus à l’exercice. C’est pourquoi il est important pour l’entraîneur de se poser comme question « quelle quantité d’effort pourra être allouée à l’athlète ? ».

Par conséquent, il devra tenir compte de l’influence de la vie extra-sportive de son sportif sur son état de forme et de sa disponibilité mentale. Par exemple, il suffit que l’athlète ait eu un stage, un rendez-vous professionnel, travailler de nuit, il sera susceptible d’arriver fatigué et donc, ni en forme et ni disponible mentalement pour réaliser une séance de VMA longue qui requiert des allures de courses précises avec peu de récupération. Il sera donc préférable de réguler l’entraînement en remplaçant la séance VMA par une séance aérobie. La VMA longue sera repoussée à une autre fois.

Pour cela, l’athlète ne devra pas négliger sa récupération afin d’être disponible physiquement et mentalement au prochain entraînement. Ainsi il sera plus apte à reconstituer toutes ses réserves utilisées et, métaboliser les produits néfastes à l’organisme.

La récupération a en effet un rôle primordial pour l’optimisation de l’entraînement. Elle dépend d’une multitude de facteurs en interaction : les facteurs environnementaux, nutritionnels, psychologiques, physiques, du type d’exercice, de la fatigue hors l’âge et le sexe.

2/ L’importance relative à l’amélioration de l’aspect psychologique.

L’intérêt de prendre en considération les projets du sportif repose également sur l’aspect mental. Nous pourrons la distinguer en trois catégories : (1) les conditions d’entraînement, (2) la disponibilité mentale, et (3) l’investissement.

–       Conditions d’entraînement : Concilier « entraînement et projet de vie » génère une meilleure condition d’entraînement pour l’athlète. Par conséquent, la programmation d’entraînement adaptée à l’emploi du temps du sportif lui permet de s’entraîner dans des meilleures conditions car elle sera adaptée à son rythme de vie. Par exemple, si l’entraîneur a tenu compte que ce soir il finira tard le travail, il ne lui mettra qu’une petite séance aérobie et de la PPG. Ainsi l’athlète sera moins stressé en allant s’entraîner. Il aura plaisir à y aller car il saura qu’il pourra la réaliser efficacement.

gestion 4– La disponibilité mentale : En effet, l’adaptation de l’entraîneur génère une meilleure disponibilité mentale de l’athlète, élément primordial pour l’optimisation de l’entraînement (notamment pour les coureurs de 800m). Chaque discipline demande une motivation à réaliser seule une séance où des temps chronométriques sont imposés. Par conséquent si l’athlète est disponible mentalement, il sera plus réactif ce qui favorisera un meilleur apprentissage et de meilleures sensations.

Par exemple, l’athlète effectuera une séance sur piste (VMA, Puissance Anaérobie lactique etc), tout en étant conscient de son placement, de la position de ses pieds, du balancement de ses bras…

–       L’investissement : Le fait que son emploi du temps soit adapté à ses entraînements permet de diminuer la fatigue physique et psychologique. Ainsi l’athlète est en meilleure forme et s’investit davantage à l’entraînement. L’aspect psychologique est important pour que l’athlète s’investisse dans l’amélioration de la performance. Grâce à ce dernier, il a plaisir à s’entraîner ce qui réduit la difficulté que l’entraînement peut avoir. Par exemple, les athlètes de 800m aiment rarement les séances de VMA longue car ils préfèrent la vitesse. Donc s’ils ont comme séance 4 x 1000m, et s’ils sont motivés pour s’investir, la séance se réalisera plus facilement.

            3/ Le plaisir au sport peut l’aider à surmonter tous ces projets.

En respectant les projets constitutifs du projet du sportif, une estime réciproque se créera entre les deux individus. Si l’athlète se sent soutenu, respecté, et non pas considéré comme un simple athlète, la symbiose entre les deux se renforcera. Ainsi, une confiance s’accomplira ce qui pourra entraîner un meilleur dialogue soit une meilleure programmation et donc une amélioration de la performance.

Ce plaisir d’être ensemble peut générer une complicité et une harmonie accrue entre les deux individus. L’épanouissement de l’athlète se renforcera dans sa vie sportive et extra-sportive. Par conséquent l’athlète pourra mieux s’investir à l’entraînement et dans ses études ou son travail professionnel. Son plaisir l’aidera à surmonter les difficultés qui peuvent l’entourer.

 

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Amandine LE CORNEC-BOUTINEAU
Entraîneur diplômé FFA
Titulaire d’un Master 2 Recherche et Professionnel
« Ingénierie de l’entraînement »

 

 

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