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Evaluer les stratégies mentales des athlètes Par Nadine DEBOIS, Responsable du laboratoire de Psychologie et d’Ergonomie du Sport de l’INSEP

L’intersaison est un moment privilégié pour faire le point sur la saison écoulée et fixer de nouveaux objectifs de travail et de performance. Traditionnellement, l’entraîneur fait le bilan des progrès physiques et techniques de ses athlètes et planifie les séances d’entraînement pour la saison suivante.

De la même manière, il peut être intéressant d’aider l’athlète à se fixer des objectifs sur le plan mental : améliorer sa concentration, gagner en confiance, savoir se relaxer ou au contraire s’activer quand cela est nécessaire, gérer le stress, … constituent des habiletés mentales que l’on peut travailler à l’entraînement.

La première étape est de faire le bilan de la manière dont l’athlète gère mentalement les entraînements et les compétitions. Pour cela, l’entraîneur dispose de plusieurs moyens : cela peut se faire soit par un entretien, ou en demandant à chaque athlète de renseigner un petit questionnaire d’enquête. Il existe également des questionnaires psychométriques permettant d’obtenir une évaluation chiffrée du niveau de maîtrise que l’athlète s’attribue dans son recours à des stratégies mentales comme la concentration, la gestion des émotions ou encore l’imagerie.

La première étape est de faire le bilan de la manière dont l’athlète gère mentalement les entraînements et les compétitions. Pour cela, l’entraîneur dispose de plusieurs moyens : cela peut se faire soit par un entretien, ou en demandant à chaque athlète de renseigner un petit questionnaire d’enquête. Il existe également des questionnaires psychométriques permettant d’obtenir une évaluation chiffrée du niveau de maîtrise que l’athlète s’attribue dans son recours à des stratégies mentales comme la concentration, la gestion des émotions ou encore l’imagerie.

Le bilan par entretien

L’entraîneur qui souhaite réaliser un bilan d’intersaison avec ses athlètes sous forme d’entretien doit toujours garder à l’esprit que la manière de conduire l’entretien, de poser les questions ou encore de réagir aux propos de l’athlète, peut influer grandement sur la qualité et l’intérêt de l’entretien. Ainsi, dans un bilan d’intersaison, l’entraîneur privilégiera des entretiens individuels plutôt que collectif. Il choisira un endroit calme où l’entretien ne risque pas d’être interrompu à tout bout de champ et où la confidentialité des propos sera assurée.

Pendant l’entretien, il importe de veiller à laisser le plus possible s’exprimer l’athlète. L’entraîneur doit s’efforcer d’adopter une position d’écoute. Le but n’est pas d’influer sur l’athlète en lui faisant part d’emblée de ce que l’on a perçu de son mental en compétition, par exemple, mais de le laisser décrire ce que lui a ressenti. Enfin, pour bien cibler l’objet de l’entretien, il est souhaitable de prévoir à l’avance un guide d’entretien recensant les points particuliers que l’on souhaite aborder. De même, le plus tôt possible après l’entretien, il est important de noter les principaux points évoqués, et les perspectives de travail qui découlent du bilan effectué. L’entraîneur pourra alors réfléchir à la manière de prendre en compte les demandes de l’athlète, à ce qu’il est en mesure de faire pour aider l’athlète à s’améliorer et lui faire des propositions concrètes. Cette étape est importante car elle peut être révélatrice pour l’entraîneur d’un besoin de formation ou d’information complémentaire. Supposons qu’un athlète dise ne pas parvenir à se relaxer quand il se sent tendu en compétition. Il sait qu’il existe des techniques de respiration ventrale et de relaxation, et il souhaiterait apprendre à les utiliser. Si l’entraîneur maîtrise ces techniques, il peut facilement les intégrer dans l’entraînement, pendant les phases de récupération par exemple. S’il ne les connaît pas, il ne pourra aider l’athlète dans ce domaine qu’en se formant d’abord lui-même, ou en confiant ce travail (au moins temporairement) à quelqu’un d’autre.

Le questionnaire d’enquête

Le questionnaire d’enquête peut être utilisé seul ou en préalable à l’entretien. Dans ce cas, il sert de guide d’entretien. Il est recommandé que l’athlète garde ce questionnaire dans son carnet d’entraînement. Il pourra ainsi le revisiter de temps en temps pour garder à l’esprit ce qu’il souhaite travailler à l’entraînement sur le plan mental pour optimiser son potentiel en compétition.

Les questions posées peuvent être les suivantes :

1. Quelles sont les qualités qui te semblent importantes sur le plan du mental pour réussir dans ta spécialité ? (En fonction des réponses de ses athlètes, l’entraîneur pourra éventuellement compléter leur liste en leur faisant prendre conscience de l’intérêt de développer telle ou telle stratégie mentale qu’ils n’auront pas citée)

2. D’une manière générale, quels sont les points forts que tu t’attribues concernant :

– Ton mental à l’entraînement

РTon mental en comp̩tition

3. Quels sont les points que tu aimerais améliorer sur le plan mental ?

– A l’entraînement

РEn comp̩tition

  1. 4.      Décris comment tu as géré mentalement les deux compétitions au cours desquelles tu as réalisé tes deux meilleures performances de la saison ? (réponds aux questions suivantes pour chaque compétition)
  • Quels étaient tes objectifs dans cette épreuve ?
  • Comment t’es-tu préparé(e) mentalement avant l’épreuve ?
  • Sur quoi t’es-tu concentré(e) avant l’épreuve ?
  • Sur quoi t’es-tu concentré(e) pendant l’épreuve ?
  • As-tu éprouvé des émotions avant l’épreuve ? Lesquelles ? Est-ce ces émotions t’ont plutôt aidé(e) ou gêné(e) ?
  • As-tu éprouvé des émotions pendant l’épreuve ? Lesquelles ? Est-ce ces émotions t’ont plutôt aidé(e) ou gêné(e) ?
  • Qu’as-tu retenu de positif sur la manière dont tu as géré mentalement cette épreuve ?
  • Qu’as-tu retenu de négatif sur la manière dont tu as géré mentalement cette épreuve ?
  1. 5.      Décris comment tu as géré mentalement les deux compétitions au cours desquelles tu as réalisé tes deux moins bonnes performances de la saison ? (réponds aux questions suivantes pour chaque compétition)
    • Quels étaient tes objectifs dans cette épreuve ?
    • Comment t’es-tu préparé(e) mentalement avant l’épreuve ?
    • Sur quoi t’es-tu concentré(e) avant l’épreuve ?
    • Sur quoi t’es-tu concentré(e) pendant l’épreuve ?
    • As-tu éprouvé des émotions avant l’épreuve ? Lesquelles ? Est-ce ces émotions t’ont plutôt aidé(e) ou gêné(e) ?
    • As-tu éprouvé des émotions pendant l’épreuve ? Lesquelles ? Est-ce ces émotions t’ont plutôt aidé(e) ou gêné(e) ?
    • Qu’as-tu retenu de positif sur la manière dont tu as géré mentalement cette épreuve ?
    • Qu’as-tu retenu de négatif sur la manière dont tu as géré mentalement cette épreuve ?
  1. 6.      D’une manière générale, quelle note de 1 à 7 t’attribues-tu pour chacune des caractéristiques mentales qui suivent :
    1. Confiance
    2. Volonté
    3. Persévérance (notamment dans les difficultés)
    4. Gestion du stress
    5. Capacité à se relaxer
    6. Capacité à s’activer
    7. Concentration
    8. Capacité d’imagerie

Le Test des Stratégies Personnelles (TSP)

Le TSP (Test des Stratégies Personnelles ; version française du TOPS ; Thomas, Murphy, & Hardy, 1999) est un questionnaire psychométrique qui permet d’évaluer, à partir d’un panel de 8 stratégies mentales, l’utilisation que les athlètes en font en situation d’entraînement d’une part, en compétition d’autre part.

Ces stratégies mentales sont les suivantes :

  1. Contrôle attentionnel (entraînement) et contrôle des pensées parasites (compétition)
  2. Fixation de buts
  3. Imagerie
  4. Relaxation
  5. Activation
  6. Discours interne
  7. Automaticité

Le questionnaire comporte en tout 64 items auxquels l’athlète répond sur une échelle en 5 points allant de jamais à toujours. Le tableau qui suit donne des exemples d’items du questionnaire :

Jamais Rarement Quelquefois Souvent Toujours
O O O O O

 

Echelle

Entraînement Compétition
Fixation de but Pour l’entraînement, je me fixe des buts réalistes mais stimulants Je me fixe des buts très spécifiques pour la compétition
Contrôle émotionnel J’éprouve des difficultés à maîtriser mes émotions quand les choses ne vont pas bien à l’entraînement Quand quelque chose me contrarie en compétition, la réalisation de ma performance en souffre
Relaxation J’utilise un temps d’entraînement pour travailler sur ma technique de relaxation Je suis capable de me relaxer si je deviens trop nerveux en compétition
Activation Pendant les séances d’entraînement, je m’entraîne à augmenter mon niveau de dynamisme En compétition, je peux me dynamiser quand c’est nécessaire
Contrôle attentionnel Pendant l’entraînement, je fixe mon attention de manière efficace Je maintiens mes pensées positives pendant les compétitions
Imagerie A l’entraînement, je repasse ma performance dans ma tête avant de me mettre en action Je répète ma performance dans ma tête en compétition
Discours interne Je me parle à moi-même pour m’aider dans la réalisation de ma performance à l’entraînement Je gère mon discours interne de manière efficace pendant la compétition
Automaticité A l’entraînement, je fais en sorte de ne pas trop réfléchir à l’exécution de ma performance…je la laisse simplement s’effectuer Pendant la compétition, je réalise ma performance en « pilote automatique »

 

Ce questionnaire permet d’obtenir un profil des stratégies mentales de l’athlète, comme celui présenté dans la figure suivante* :

résultat graphique

Ce graphique permet de repérer très vite, visuellement, le profil d’un athlète. On peut procéder en observant les écarts de scores entre les différentes stratégies évaluées. Il est intéressant de procéder en trois temps, c’est-à-dire en observant séparément :

  1. les scores de compétition
  2. les scores d’entraînement
  3. les deux ensembles

Il peut être également utile de compléter le test par un entretien où les scores observés pourront être discutés avec l’athlète pour apporter des éléments qualitatifs en complément.

            Ainsi, le graphe donné en exemple décrit un athlète qui apparaît très perfectible sur le plan de la gestion mentale des situations de compétition comme d’entraînement. Ses scores les plus faibles en compétition se situent au niveau du contrôle émotionnel, de la relaxation et de l’automaticité. Il semble qu’il ait du mal à supporter la pression des enjeux de compétition, ce qui l’amène à ressentir des sensations de stress et de tension qu’il ne parvient pas à réguler, et une réaction de recherche de contrôle en se focalisant sur la technique, au lieu de laisser aller le mouvement pour privilégier la fluidité et le rendement. On retrouve un score faible en relaxation à l’entraînement. Or, on sait que plus une habileté mentale est régulièrement travaillée à l’entraînement, plus l’athlète sera à même de l’utiliser efficacement et à moindre coût si nécessaire en compétition. Enfin, on observe un score en fixation de buts nettement plus faible à l’entraînement qu’en compétition. Il sera intéressant de sensibiliser l’athlète à l’intérêt de se fixer des buts, pas seulement en compétition, mais aussi à l’entraînement. Ceci contribue à être plus actif dans la séance, plus réceptif à ce que l’on réalise et aux consignes.

            Ainsi, même si cet athlète est perfectible dans tous les domaines sur le plan des habiletés mentales, on ne peut pas vouloir tout améliorer en même temps. Les priorités de travail seraient donc :

–          de l’amener à se fixer régulièrement à l’entraînement des buts précis, particuliers aux différents moments de la séance (par exemple en lui demandant de tenir un cahier d’entraînement, de noter les buts de la séance, et d’évaluer après-coup dans quel mesure il a gardé en tête ces buts pendant le déroulement de l’entraînement),

–          de mettre à profit les phases de récupération pendant et en fin d’entraînement, pour lui apprendre des techniques de régulation de son niveau d’activation, et notamment de relaxation,

–          de l’habituer à ne porter son attention, à l’entraînement comme en compétition, qu’à des choses qui sont de son contrôle (qualité de l’échauffement, sensations kinesthésiques, discours interne centré sur l’action, gestion du rythme de course, de saut, de lancer, …) et à évacuer tout ce qu’il ne peut pas contrôler (les autres athlètes, les conditions atmosphériques, les attentes de son entourage à son égard,…).

Nadine Debois 5

Nadine Debois
Responsable du Laboratoire de Psychologie et d’Ergonomie du Sport à l’INSEP

 

Si vous êtes intéressé(e) par ce questionnaire et souhaitez le faire remplir par vos athlètes, vous pouvez contacter Nadine Debois par e-mail (nadine.debois@insep.fr)

 

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